La fiscalité des biens immobiliers détenus en France par des expatriés peut s’avérer complexe. Entre les règles spécifiques aux non-résidents, les conventions fiscales internationales et les différents régimes d’imposition, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver. Cet article fait le point sur les règles fiscales applicables aux expatriés propriétaires de biens locatifs en France.
Détermination du statut fiscal de l’expatrié
Avant d’aborder la fiscalité des revenus locatifs, il est essentiel de déterminer le statut fiscal de l’expatrié. En effet, le traitement fiscal diffère selon que l’on est considéré comme résident ou non-résident fiscal en France.
Les critères de résidence fiscale en France
Selon l’article 4 B du Code général des impôts, sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France les personnes qui remplissent l’un des critères suivants :
- Avoir son foyer ou le lieu de séjour principal en France
- Exercer une activité professionnelle en France, sauf si elle est accessoire
- Avoir le centre de ses intérêts économiques en France
Il suffit de remplir un seul de ces critères pour être considéré comme résident fiscal français. À noter que la nationalité n’entre pas en compte dans cette détermination.
Le cas particulier des conventions fiscales internationales
Les conventions fiscales bilatérales signées entre la France et de nombreux pays peuvent modifier les règles de détermination de la résidence fiscale. Elles visent notamment à éviter les situations de double imposition.
Ces conventions, basées sur le modèle OCDE, prévoient généralement les critères suivants pour déterminer la résidence fiscale :
- Le foyer d’habitation permanent
- Le centre des intérêts vitaux
- Le lieu de séjour habituel
- La nationalité
Ces critères s’appliquent dans cet ordre jusqu’à ce qu’un pays de résidence fiscale soit déterminé.
Pays | Convention fiscale avec la France | Date de signature |
---|---|---|
Allemagne | Oui | 21/07/1959 |
Royaume-Uni | Oui | 19/06/2008 |
États-Unis | Oui | 31/08/1994 |
Suisse | Oui | 09/09/1966 |
Imposition des revenus fonciers pour les expatriés
Une fois le statut fiscal déterminé, intéressons-nous à l’imposition des revenus fonciers perçus par les expatriés sur leurs biens locatifs en France.
Principes généraux d’imposition
Les revenus fonciers de source française sont toujours imposables en France, que le propriétaire soit résident fiscal français ou non. Cette règle découle du principe de territorialité de l’impôt sur le revenu.
Cependant, le régime d’imposition et les modalités déclaratives peuvent varier selon le statut fiscal du propriétaire.
Imposition des résidents fiscaux français
Les expatriés considérés comme résidents fiscaux français sont imposés sur l’ensemble de leurs revenus mondiaux, y compris leurs revenus fonciers français. Ils bénéficient des mêmes règles d’imposition que les résidents « »classiques » » :
- Régime micro-foncier : applicable si les revenus fonciers bruts n’excèdent pas 15 000 € par an
- Régime réel : obligatoire au-delà de 15 000 € de revenus fonciers bruts, ou sur option
Imposition des non-résidents fiscaux
Les expatriés non-résidents fiscaux français sont imposés uniquement sur leurs revenus de source française, dont font partie les revenus fonciers. Des règles spécifiques s’appliquent :
- Taux minimum d’imposition : 20% jusqu’à 27 519 € de revenus nets imposables, 30% au-delà
- Possibilité d’opter pour le taux moyen si plus avantageux
- Application des prélèvements sociaux (17,2% ou 7,5% selon les cas)
Les différents régimes d’imposition des revenus fonciers
Examinons maintenant plus en détail les deux principaux régimes d’imposition des revenus fonciers : le micro-foncier et le réel.
Le régime micro-foncier
Le régime micro-foncier est un régime simplifié d’imposition des revenus fonciers. Il s’applique automatiquement si les conditions suivantes sont remplies :
- Revenus fonciers bruts annuels inférieurs à 15 000 €
- Les biens ne bénéficient pas d’un régime fiscal particulier (Pinel, Malraux, etc.)
- Le contribuable n’est pas propriétaire de parts de SCI non soumises à l’IS
Dans ce régime, un abattement forfaitaire de 30% est appliqué sur les revenus bruts pour tenir compte des charges. Le revenu net imposable est donc égal à 70% des loyers perçus.
Le régime réel
Le régime réel s’applique obligatoirement au-delà de 15 000 € de revenus fonciers bruts annuels. Il peut également être choisi sur option par les contribuables relevant normalement du micro-foncier.
Dans ce régime, le revenu net imposable est déterminé en déduisant les charges réelles des revenus bruts. Les principales charges déductibles sont :
- Frais d’administration et de gestion
- Primes d’assurance
- Travaux de réparation et d’entretien
- Taxes foncières
- Intérêts d’emprunt
Le régime réel permet également de constater un éventuel déficit foncier, imputable sur le revenu global dans la limite de 10 700 € par an.
Cas particulier de la location meublée
La location meublée obéit à des règles fiscales spécifiques, qu’il s’agisse d’une location meublée professionnelle (LMP) ou non professionnelle (LMNP).
Location meublée non professionnelle (LMNP)
Les revenus tirés de la location meublée non professionnelle sont imposés dans la catégorie des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC). Deux régimes sont possibles :
- Micro-BIC : applicable si les recettes annuelles n’excèdent pas 77 700 € (176 200 € pour les meublés de tourisme classés). Un abattement forfaitaire de 50% (71% pour les meublés de tourisme) est appliqué.
- Régime réel : obligatoire au-delà des seuils du micro-BIC ou sur option. Il permet de déduire les charges réelles et de pratiquer l’amortissement du bien et du mobilier.
Location meublée professionnelle (LMP)
Le statut de loueur en meublé professionnel est obtenu lorsque les conditions suivantes sont remplies :
- Recettes annuelles supérieures à 23 000 €
- Ces recettes excèdent les autres revenus d’activité du foyer fiscal
Les revenus sont alors imposés dans la catégorie des BIC, avec la possibilité d’imputer les déficits sur le revenu global sans limitation.
Régime | Seuil d’application | Avantages | Inconvénients |
---|---|---|---|
Micro-BIC | < 77 700 € | Simplicité, abattement forfaitaire | Pas de déficit possible |
Réel LMNP | > 77 700 € ou sur option | Déduction des charges réelles, amortissement | Comptabilité obligatoire |
LMP | > 23 000 € et > autres revenus | Déficit imputable sans limite | Cotisations sociales dues |
Prélèvements sociaux sur les revenus fonciers des expatriés
Les revenus fonciers des expatriés sont soumis aux prélèvements sociaux, mais des règles particulières s’appliquent selon la situation du contribuable.
Taux et composition des prélèvements sociaux
Les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, dont font partie les revenus fonciers, sont composés de :
- CSG (Contribution Sociale Généralisée) : 9,2%
- CRDS (Contribution au Remboursement de la Dette Sociale) : 0,5%
- Prélèvement de solidarité : 7,5%
Soit un taux global de 17,2%.
Cas particulier des résidents de l’EEE et de la Suisse
Depuis 2018, les personnes affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale dans un autre État membre de l’Espace Économique Européen (UE + Islande, Liechtenstein, Norvège) ou en Suisse bénéficient d’une exonération de CSG et de CRDS sur leurs revenus du patrimoine.
Ces contribuables restent néanmoins redevables du prélèvement de solidarité de 7,5%.
Modalités déclaratives
Pour bénéficier de l’exonération de CSG et CRDS, les contribuables concernés doivent :
- Indiquer le montant total de leurs revenus fonciers en case 4BA ou 4BE de la déclaration 2042
- Cocher la case 8SH (pour le déclarant 1) et/ou 8SI (pour le déclarant 2) dans la rubrique « »Divers » » de la déclaration 2042 C
- Préciser en case 8RF le montant des revenus exonérés de CSG/CRDS si un seul des membres du couple remplit les conditions d’exonération
Obligations déclaratives des expatriés propriétaires
Les obligations déclaratives des expatriés propriétaires de biens locatifs en France varient selon leur statut fiscal et le régime d’imposition applicable.
Pour les résidents fiscaux français
Les expatriés considérés comme résidents fiscaux français doivent déclarer l’ensemble de leurs revenus mondiaux, y compris leurs revenus fonciers français. Ils doivent remplir :
- La déclaration 2042 pour l’ensemble de leurs revenus
- La déclaration 2044 pour le détail des revenus fonciers si le régime réel s’applique
Pour les non-résidents fiscaux
Les expatriés non-résidents fiscaux doivent déclarer uniquement leurs revenus de source française, dont les revenus fonciers. Ils doivent remplir :
- La déclaration 2042 pour l’ensemble de leurs revenus de source française
- La déclaration 2044 pour le détail des revenus fonciers si le régime réel s’applique
- La déclaration 2041-E spécifique aux non-résidents
Cas particulier des revenus de SCI
Si les revenus fonciers proviennent de parts de Sociétés Civiles Immobilières (SCI) soumises à l’impôt sur le revenu, les obligations déclaratives sont les suivantes :
- Le gérant de la SCI doit déposer une déclaration 2072 en ligne
- Les associés doivent reporter leur quote-part de résultat directement sur la déclaration 2042, sans utiliser la 2044