Les commissions d’intervention font partie des frais bancaires les plus controversés en France. Prélevées par les banques en cas d’incident sur un compte, elles peuvent rapidement s’accumuler et peser lourd dans le budget des clients, en particulier ceux en difficulté financière. Cet article fait le point sur le fonctionnement, la réglementation et les enjeux de ces commissions, ainsi que les moyens de les éviter ou de les contester.
Définition et fonctionnement des commissions d’intervention
Qu’est-ce qu’une commission d’intervention ?
Une commission d’intervention est un frais facturé par une banque lorsqu’elle doit intervenir sur le compte d’un client suite à une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement. Concrètement, cela concerne principalement deux types de situations :
- Un paiement ou un prélèvement qui entraîne un découvert non autorisé sur le compte
- Un paiement ou un prélèvement qui aggrave un découvert existant au-delà de la limite autorisée
La banque justifie ces frais par le traitement particulier que nécessite la gestion de ces incidents. Elle considère qu’elle rend un service au client en acceptant d’honorer une opération alors que le compte n’est pas suffisamment approvisionné.
Dans quels cas une commission d’intervention est-elle appliquée ?
Les commissions d’intervention peuvent être prélevées notamment dans les situations suivantes :
- Paiement par carte bancaire alors que le solde du compte est insuffisant
- Prélèvement automatique (loyer, facture…) sans provision suffisante
- Chèque émis sans provision
- Virement effectué alors que le compte est à découvert
- Retrait d’espèces au distributeur entraînant un dépassement
À noter que les commissions d’intervention s’ajoutent aux éventuels agios (intérêts débiteurs) facturés en cas de découvert. Elles se cumulent également avec d’autres frais comme les frais de rejet de prélèvement ou de chèque sans provision.
Comment sont calculées les commissions d’intervention ?
Les commissions d’intervention sont généralement facturées sous forme de frais fixes par opération. Le montant est défini librement par chaque banque, dans la limite des plafonds légaux (voir plus bas).
Par exemple, si une banque applique une commission de 8€ par opération :
- Un client qui effectue un paiement de 100€ alors que son compte n’a que 80€ de solde se verra facturer 8€ de commission
- S’il effectue 3 opérations dans le mois entraînant un dépassement, il paiera 3 x 8€ = 24€ de commissions
Les commissions sont généralement prélevées à la fin du mois sur le compte du client. Elles apparaissent sur le relevé bancaire sous l’intitulé « Commission d’intervention » ou « Frais d’intervention ».
Réglementation des commissions d’intervention en France
Encadrement légal et plafonnement des commissions
Face aux critiques sur le caractère abusif des commissions d’intervention, le législateur est intervenu pour encadrer ces frais. La loi bancaire du 26 juillet 2013 a ainsi instauré un plafonnement des commissions d’intervention, entré en vigueur le 1er janvier 2014.
Les plafonds légaux sont les suivants :
Type de client | Plafond par opération | Plafond mensuel |
---|---|---|
Client standard | 8€ | 80€ |
Client fragile financièrement | 4€ | 20€ |
Ces plafonds s’appliquent à tous les établissements bancaires pour leur clientèle de particuliers. Les banques restent libres de fixer des tarifs inférieurs.
Obligations d’information et de transparence
La réglementation impose également aux banques des obligations de transparence concernant les commissions d’intervention :
- Le montant de la commission doit figurer dans l’extrait standard des tarifs bancaires
- Le client doit être informé du prélèvement d’une commission au moins 14 jours à l’avance
- Le relevé bancaire doit faire apparaître clairement le montant des commissions prélevées
Ces règles visent à permettre aux clients de mieux anticiper et comprendre les frais qui leur sont facturés.
Cas particulier des clients en situation de fragilité financière
La loi prévoit un régime spécifique pour les clients considérés comme financièrement fragiles par leur banque. Ces derniers bénéficient :
- D’un plafonnement renforcé des commissions (4€ par opération, 20€ par mois)
- De la possibilité de souscrire à une offre bancaire spéciale à tarif réduit
- D’un plafonnement global de l’ensemble des frais d’incidents à 25€ par mois
Ces mesures visent à protéger les clients les plus vulnérables face à l’accumulation de frais bancaires.
Comparatif des tarifs pratiqués par les principales banques
Analyse des commissions d’intervention dans les banques traditionnelles
Malgré le plafonnement légal, on observe des différences de tarification entre les banques concernant les commissions d’intervention. Voici un comparatif pour les principales banques traditionnelles :
Banque | Commission par opération | Plafond mensuel |
---|---|---|
BNP Paribas | 8€ | 80€ |
Société Générale | 8€ | 80€ |
Crédit Agricole | 8€ | 80€ |
LCL | 8€ | 80€ |
La Banque Postale | 6,90€ | 80€ |
On constate que la plupart des banques se sont alignées sur le plafond légal de 8€ par opération. Seule La Banque Postale propose un tarif légèrement inférieur.
Les commissions d’intervention dans les banques en ligne
Les banques en ligne se distinguent par une politique tarifaire plus avantageuse concernant les commissions d’intervention :
Banque en ligne | Commission par opération | Plafond mensuel |
---|---|---|
Boursorama Banque | 0€ | 0€ |
Hello Bank! | 0€ | 0€ |
Fortuneo | 0€ | 0€ |
ING | 0€ | 0€ |
Monabanq | 0€ | 0€ |
La grande majorité des banques en ligne ont fait le choix de ne pas facturer de commissions d’intervention à leurs clients. Cette politique s’inscrit dans leur stratégie globale de frais bancaires réduits.
Évolution des tarifs ces dernières années
L’analyse de l’évolution des commissions d’intervention sur les dernières années montre :
- Une stabilisation des tarifs dans les banques traditionnelles depuis l’instauration du plafonnement légal
- Une tendance à la baisse voire à la suppression dans les banques en ligne et les néobanques
- Un renforcement des mesures en faveur des clients fragiles (plafonnement global des frais d’incidents)
Cette évolution reflète à la fois l’impact de la réglementation et la pression concurrentielle exercée par les nouveaux acteurs bancaires.
Impact des commissions d’intervention sur les clients
Poids financier pour les ménages
Les commissions d’intervention peuvent représenter une charge financière significative pour certains ménages, en particulier ceux qui connaissent des difficultés budgétaires. Quelques chiffres permettent d’illustrer cet impact :
- Un client qui subit 5 incidents par mois peut se voir facturer jusqu’à 40€ de commissions
- Sur une année, le montant peut atteindre 480€ pour un client atteignant régulièrement le plafond mensuel de 80€
- Selon une étude de 60 Millions de Consommateurs, les frais d’incidents (dont les commissions d’intervention) représenteraient en moyenne 296€ par an et par ménage
Pour les foyers aux revenus modestes, ces frais peuvent grever significativement le budget et aggraver une situation financière déjà fragile.
Cercle vicieux pour les clients en difficulté
Les commissions d’intervention sont souvent critiquées pour leur effet « boule de neige » sur les clients en difficulté financière. Le mécanisme est le suivant :
- Un client rencontre des difficultés passagères et son compte passe à découvert
- Les opérations suivantes génèrent des commissions d’intervention
- Ces frais aggravent le découvert, entraînant de nouvelles commissions
- Le client se retrouve dans une spirale d’endettement dont il a du mal à sortir
Ce phénomène explique pourquoi les associations de consommateurs militent pour une réforme en profondeur du système des commissions d’intervention.
Débat sur la justification des commissions
La légitimité même des commissions d’intervention fait l’objet de débats. Les arguments avancés sont les suivants :
Arguments des banques | Arguments des détracteurs |
---|---|
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Ce débat alimente les réflexions sur une éventuelle évolution de la réglementation concernant ces frais.
Comment éviter ou limiter les commissions d’intervention ?
Conseils pour une bonne gestion de son compte bancaire
La meilleure façon d’éviter les commissions d’intervention est d’adopter une gestion rigoureuse de son compte bancaire. Voici quelques conseils pratiques :
- Surveiller régulièrement son solde : consulter fréquemment l’état de son compte (via l’application mobile par exemple) permet d’anticiper les risques de découvert
- Tenir un budget : noter ses dépenses et ses revenus aide à mieux maîtriser sa situation financière
- Prévoir une marge de sécurité : garder si possible un « matelas » de 200 à 300€ sur son compte courant pour faire face aux imprévus
- Programmer ses prélèvements : dans la mesure du possible, faire coïncider la date des prélèvements importants (loyer, etc.) avec celle des rentrées d’argent (salaire)
- Utiliser les alertes SMS/email : paramétrer des notifications en cas de solde bas ou d’opérations importantes
Ces bonnes pratiques permettent de réduire significativement le risque d’incidents.