Aujourd’hui, je vais vous parler d’un sujet qui intéresse de nombreux épargnants : la fiscalité de l’assurance vie en cas de succession. Au-delà de son intérêt pour se constituer un capital ou un complément de revenus, l’assurance vie est aussi très prisée pour transmettre un patrimoine dans un cadre fiscal avantageux. Mais quels sont exactement les avantages fiscaux de l’assurance vie au moment de la succession ? Comment fonctionne la transmission du capital aux bénéficiaires ? L’assurance vie fait-elle partie de la succession ? Je vais tâcher de répondre en détails à toutes ces questions dans cet article. Suivez le guide !
L’assurance vie : un cadre fiscal distinct de la succession
La première chose à bien comprendre, c’est que l’assurance vie ne fait pas partie de la succession à proprement parler. L’article L132-12 du Code des assurances prévoit en effet que le capital versé au bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie à la suite du décès de l’assuré est en dehors de la succession. Cela signifie que :
- Le capital transmis aux bénéficiaires n’est pas intégré à l’actif successoral soumis aux règles civiles de la succession (il n’est pas réparti entre les héritiers selon les règles légales)
- Le capital échappe également, sous certaines conditions, aux droits de succession
Ainsi, contrairement à un patrimoine classique, le souscripteur d’une assurance vie a la libre disposition du capital pour le transmettre aux bénéficiaires de son choix, sans que cela ne rentre dans le cadre de la succession. C’est un des gros avantages de ce placement qui permet d’organiser sa transmission dans une plus grande liberté.
Cette sortie de la succession s’applique quel que soit le lien de parenté entre le souscripteur et le bénéficiaire (conjoint, enfant, autre parent, ami, association, etc.). Comme le précise l’article L132-13 du Code des assurances, le capital versé au bénéficiaire n’est en principe pas non plus soumis aux règles de la réserve héréditaire et de la réduction pour atteinte à cette réserve.
Il faut cependant noter quelques exceptions où l’assurance vie peut être réintégrée à la succession :
- Lorsque les primes versées par l’assuré sont considérées comme « manifestement exagérées » au regard de ses facultés (réintégration pour la portion excédant les primes « raisonnables »).
- Lorsque le souscripteur est marié sous le régime de la communauté et que les primes ont été payées avec des fonds communs, le conjoint survivant récupère la moitié du capital.
A part ces cas particuliers, le principe reste bien que le capital décès de l’assurance vie est transmis « hors succession » au bénéficiaire désigné. Mais qu’en est-il de la fiscalité applicable à ce capital ? Est-il totalement exonéré d’impôts ? Pas tout à fait. Je vous explique tout cela dans la partie suivante.
La fiscalité du capital transmis au bénéficiaire
Bien que le capital décès de l’assurance vie soit transmis en dehors de la succession, il n’échappe pas totalement à la fiscalité. Cependant, il bénéficie là encore d’un régime très favorable par rapport à l’application classique des droits de succession. Les règles varient selon la date des versements et l’âge de l’assuré lors de ces versements :
Primes versées avant les 70 ans de l’assuré
Pour les versements effectués sur le contrat avant les 70 ans de l’assuré, chaque bénéficiaire profite d’un abattement de 152 500 € sur la part de capital lui revenant. En-dessous de ce montant, le capital reçu est totalement défiscalisé.
Au-delà de l’abattement, le capital est soumis à un prélèvement forfaitaire de :
- 20% pour la fraction de capital entre 152 500 € et 852 500 €
- 31,25% pour la fraction de capital supérieure à 852 500 €
A noter que ces abattements et ce barème forfaitaire s’appliquent bénéficiaire par bénéficiaire. Si vous désignez plusieurs bénéficiaires, ils ont chacun droit à l’abattement de 152 500 € et les tranches d’imposition s’appliquent individuellement sur leur part de capital.
Primes versées après 70 ans
Les sommes versées sur un contrat d’assurance vie après les 70 ans de l’assuré sont davantage taxées. Là encore, un abattement s’applique, mais il est global et limité à 30 500 €. Cet abattement se répartit entre tous les bénéficiaires, proportionnellement au capital reçu.
Au-delà de cet abattement global de 30 500 €, le capital est soumis aux droits de succession selon le lien de parenté entre l’assuré et le bénéficiaire et selon un barème progressif.
Cas d’exonérations des droits de succession
Depuis la loi TEPA de 2007, certains bénéficiaires très proches du défunt sont totalement exonérés de droits de succession sur le capital décès de l’assurance vie, quel que soit leur âge au moment des versements :
- Le conjoint survivant de l’assuré
- Le partenaire lié à l’assuré par un PACS
- Les frères et sœurs de l’assuré sous certaines conditions (célibataire, veuf, divorcé ou séparé ; copropriétaire avec le défunt de leur résidence principale ; âgé de plus de 50 ans ou atteint d’une infirmité)
Ainsi, la transmission de l’assurance vie au conjoint est totalement défiscalisée. C’est un atout majeur de ce placement pour protéger son conjoint.
Les associations et fondations reconnues d’utilité publique bénéficient également d’une exonération totale des droits de succession lorsqu’elles sont désignées bénéficiaires d’un contrat d’assurance vie. Cela en fait un outil intéressant de transmission à des œuvres caritatives.
Comment bien rédiger sa clause bénéficiaire ?
Comme on l’a vu, la désignation d’un ou plusieurs bénéficiaires est essentielle pour que le capital de l’assurance vie soit transmis selon la volonté du souscripteur et puisse échapper en grande partie à la fiscalité successorale. Il faut donc être vigilant dans la rédaction de la clause bénéficiaire qui permet cette désignation. Un avocat fiscaliste peut vous aider dans cette démarche.
La clause bénéficiaire peut être rédigée de façon nominative (en indiquant nommément les bénéficiaires) ou plus générale (mon conjoint, mes enfants, etc.). Il est conseillé de la faire suffisamment large pour englober un maximum de situations et qu’elle ne soit pas caduque si un bénéficiaire décède avant l’assuré.
La clause bénéficiaire peut être modifiée à tout moment, sauf si le bénéficiaire a été accepté. Il faut alors son accord pour modifier la clause. Pour la modifier, adressez-vous à votre assureur pour établir un avenant au contrat.
Un dernier point de vigilance : ne mentionnez jamais votre assurance vie dans votre testament ! Si vous écrivez « Je lègue mon assurance-vie à… », cela pourrait être considéré comme un legs et réintégrer l’assurance vie à votre succession, avec les conséquences fiscales que cela implique. Limitez-vous à établir votre clause bénéficiaire dans le contrat d’assurance.
Quid si vous n’avez pas désigné de bénéficiaire ?
Et si vous décédez sans avoir désigné de bénéficiaire sur votre contrat d’assurance vie ? Dans ce cas, c’est la clause type prévue dans le contrat qui s’applique. Généralement, le capital est d’abord attribué au conjoint survivant, puis à défaut aux enfants, puis aux héritiers.
L’inconvénient est ici que le capital est réintégré à la succession et soumis aux droits de succession selon les règles de droit commun, sans bénéficier des abattements spécifiques à l’assurance vie.
Comment les bénéficiaires touchent-ils le capital ?
En pratique, au décès de l’assuré, l’assureur doit rechercher activement les bénéficiaires désignés dans le contrat. Les bénéficiaires peuvent aussi se manifester auprès de l’assureur munis de l’acte de décès de l’assuré.
Ensuite, un certain nombre de documents sont à fournir à l’assureur pour percevoir le capital :
- Une pièce justifiant de l’identité du bénéficiaire
- Un RIB
- Un acte de décès de l’assuré
- Un certificat d’hérédité ou un acte de notoriété
- Une attestation sur l’honneur précisant si l’abattement de 152 500 € a déjà été utilisé ou non sur d’autres contrats
Une fois le dossier complet, l’assureur dispose de 1 mois pour verser le capital au(x) bénéficiaire(s). Au-delà, des intérêts de retard sont dus. Les sommes sont versées soit directement aux bénéficiaires, soit sur un compte ouvert à la Caisse des Dépôts et Consignations.
L’assurance vie, un outil de transmission complémentaire du testament
Pour conclure cet article, je dirais que l’assurance vie est un outil incontournable pour optimiser la transmission de son patrimoine, en complément des autres dispositifs tels que le testament. Grâce à sa fiscalité douce et à la liberté de désignation des bénéficiaires, elle permet de gratifier ses proches ou les causes qui vous sont chères avec un minimum de taxation.
Alors n’hésitez pas à inclure l’assurance vie dans votre stratégie patrimoniale et de préparation de votre succession. Veillez bien sûr à tenir à jour régulièrement votre ou vos clauses bénéficiaires en fonction des évolutions de votre situation familiale.
Vous savez désormais l’essentiel sur la fiscalité de l’assurance vie en cas de décès. Pour aller plus loin, je vous invite à vous rapprocher de votre conseiller ou de votre notaire pour étudier l’intérêt de ce placement dans votre situation patrimoniale précise. A bientôt pour de nouveaux conseils patrimoniaux !